Je vous en avais parlé sur ce blog, le nouveau projet d'Ólafur Arnalds, le touche à tout Islandais vient de sortir.
Ólafur Arnalds est un compositeur éclectique, ayant joué tour à tour du classique, du metal, de l'electro... mais dont l'univers sensible et mélancolique a été très inspiré de Chopin, musicien qu'il place haut dans son estime. Il n'est donc pas étonnant qu'il se soit attaqué à son répertoire. Pour l'occasion il est accompagné par Alice Sara Ott, pianiste germano-japonaise.
Ólafur n'étant pas un musicien de classique, il ne propose pas ici une simple nouvelle interprétation des nocturnes ou autres œuvres du pianiste franco-polonais comme il y en a tant, mais des compositions inédites, s'appuyant ou s'inspirant d’œuvres du maitre. Ainsi le premier morceau, Verses est un inédit qui est basé sur un motif de la sonate no 3 de Chopin, mais qui s'y éloigne très fortement, pour sonner comme un morceau d'Ólafur Arnalds, et c'est bon. Le second titre est justement la sonate no 3 de Chopin, joué par Alice, histoire de comparer et d'observer le chemin parcouru. Cette succession d'interprétations des œuvres de Chopin et de nouvelles compositions s'y inspirant se poursuit tout au long de l'album. Et c'est sans doute là, la principale faiblesse du projet.
Si la découverte de nouvelles œuvres du compositeur islandais justifie l'achat d'un nouvel album, les inédits ne couvrent que la moitié de l'album. Les morceaux de Chopin quant a eux, même s'ils sont joliment interprétés par Alice Sara Ott (ASO pour les fans de vélo...), n'apportent pas grand chose par rapport à ce qui se fait déjà.
De plus, il y a un trop fort contraste entre les œuvres au piano d'Alice et les compositions au violon d'Ólafur et je regrette fortement que les univers des deux musiciens ne se mélangent pas plus. A ce titre l'enchainement : Nocturne in C Sharp Minor et Reminiscence est le plus réjouissant de l'album.
Dernier défaut, mais mineur, si la comparaison des deux versions, avec la recherche des motifs communs, peut être ludique, ça peut se faire au détriment d'une écoute plus globale de l’œuvre.
Dans l'ensemble les œuvres d'Ólafur sont réussis, mais concentrent l'intérêt principal de l'album. Il peut s'agir d'une bonne porte d'entrée pour les fans de l'Islandais qui ne serait pas familiarisé à l’œuvre de Chopin (est-ce possible ?) ou plus probablement aux amoureux de Chopin et d'Alice (on les comprend sans mal) qui pourraient ainsi découvrir le talent d'Arnalds.
On commence avec l'un des groupes les plus célèbres au monde mais dont la discographie reste étonnamment obscure pour les profanes. Il n'y a qu'a se pencher sur les ventes d'albums pour s'en rendre compte. Queen est avant tout un groupe de tubes et sans surprise c'est leurs best-of qui se sont le mieux vendus. Greatest hits 1 est l'album le plus vendu au Royaume Uni et le second en Europe, tandis que le Greatest hits 2 est le second plus vendu au Royaume Uni et le plus vendu en Europe (chiffre comprenant cumulant les ventes des Greatest hits seuls et des coffrets les réunissant).
A eux deux, ces albums cumulent près de 70 millions de ventes*, à comparer au 11 millions d'A Night at The Opera et son morceau phare, Bohemian Rhapsody.
De plus, quand on pense à Queen, on met en avant leur hymne de stade (We Will Rock You, We Are The Champion), des tubes FM (I Want to Break Free, The Show Must Go On, A Kind Of Magic...) et les performances lives enflammées.
Mais avant de devenir une icône, le groupe proposait un rock plus alambiqué, plus complexe, dont leur second album, Queen II (loué par les fans, mais dont un seul morceau Seven Seas of Rhye a traversé les générations) est le point d'orgue. Un album d'une grande richesse et d'une grande finesse où la face B (Side Black) est à mon sens l'enchainement musical le plus fascinant de l'histoire du rock. Je vous laisse découvrir The March Of The Black Queen, morceau épique qui préfigure ceux que sera Bohemian Rhapsody.
The March Of The Black Queen :
Si je le place en 5, c'est bien parce que ce morceau reste tout de même relativement connu dans le monde du rock et non par une éventuelle qualité moindre, il s'agit tout simplement de ma chanson préférée.
Pour Scorpions j'ai l'embarras du choix, car ils sont connus essentiellement pour deux de leurs balades, Wind of Change (125 000 000 de vues sur Youtube, tout de même) et Still Loving You :
Moins nombreux sont ceux qui connaissent Scorpions pour ceux qu'ils sont en réalité, un groupe de Heavy Metal, même si là encore certains de leurs morceaux ont connu un succès certains :
Moins nombreux encore sont ceux qui se sont penchés sur leur première partie de carrière (commencée en 1965 !), lorsque emmené par le fantasque Uli J Roth à la guitare (arrivé pour le second album), ils proposaient un Hard Rock à la limite de psychédélique. J'aurais pu citer l'excellentissime Taken by force qui contient le meilleur riff de guitare de l'histoire du rock, sur Sails of Charon, mais cet album à la croisée des chemins a déjà bien entamé son virage Heavy.
C'est donc leur second album, Fly to the Rainbow (1974), beaucoup plus confidentiel que je vais mettre en avant. Du Hard Rock aérien, encore marqué par le psychédélisme de leur début, mais plus incisif, notamment grâce au renfort d'Uli Jon Roth, guitariste exceptionnel. Le morceau titre est un petit bijou d'un peu moins de 10 minutes qui s'ouvre par un air de guitare sèche très agréable avant que le morceau ne prenne de l'ampleur tout au long de son déroulement.
Supertramp en 5 albums (De Crime of Century à ...Famous Last Words...) a forgé sa légende, en étant une véritable machine à tube (Dreamer, School, The Logical Song, Goodbye Stranger, Breakfast in America, Give a Little Bit, It's Raining Again...).
Mais à l'origine, Supertramp était un groupe de Rock Progressif qui avait sortit un premier album éponyme, qui fut un échec commercial, mais qui était néanmoins d'une grande qualité musicale. Un album aux mélodies sensibles, un rock délicat et ciselé. Le morceau présenté ici montre parfaitement leurs ambitions de l'époque. Une construction mettant en valeur un refrain accrocheur, un break bruitiste, à l'image de Moonchild de King Crimson avant le reprise du refrain pour le final.
Il faudra attendre Crime of Century (leur meilleur album) pour qu'ils proposent un équilibre entre album conceptuel et chansons phares, pour ainsi connaitre le succès international.
Vangelis est internationalement connu pour ses musiques de films, notamment son travail pour les chariots de feu et 1492 : Christophe Colomb ou encore son travail le plus accomplit selon moi, la BO de Blade Runner :
Le premier étant même utilisé à chaque remise de médailles au JO de Londres (jusqu'à saturation et pourtant j'adore ce morceau).
Mais parmi ces collaborations, il a composé l'un des albums les plus tristes qu'il m’a été donné d'entendre pour accompagner la série documentaire l'Apocalypse des animaux de Frédéric Rossif, en 1970. A ne surtout pas écouter en cas de déprime, sinon faites vous plaisir, c'est juste sublime.
Vangelis - Création du Monde
Chronique complète de l'album : A venir
Et vous connaissez également sans doute Aphrodite's Child, groupe grecque qui a vu l'éclosion du chanteur Demis Roussos, a travers ces deux chansons :
Mais le claviériste de ce groupe n'était autre que... Vangelis. Il composa intégralement leur dernier album, 666, très éloigné de la pop des deux précédents albums, et tout aussi éloigné de sa future carrière solo très new age et planante. Il s'agit d'un album de Rock Prog' très ambitieux, un peu fou, au concept tournant autour de l'Apocalyse de Saint Jean (un thème le fascinant apparemment...). Ce double album est d'une grande richesse et d'une grande complexité, mais propose néanmoins des mélodies aux accents immédiatement jouissifs, comme sur le fabuleux Four Horseman, son refrain ultra accrocheur et son solo de guitare excitant :
Mike Oldfield est un géant de la musique, l'un des artistes les plus célèbres de sa génération, qui outre une tournée allemande en 2006 et deux concerts en Espagne s'est permis de réunir 500.000 personnes à Berlin pour le passage à l'an 2000 et a connu une audience encore plus large en jouant un mini concert lors de la cérémonie d'ouverture des JO de Londres en 2012.
On le connait avant tout pour ces tubes pop chantés par Maggie Reilly, Moonlight Shadow et To France, ainsi que le thème principal du film d'horreur L'exorciste tiré de son premier album Tubular Bells.
Deux facettes de l'artiste très différentes, Tubular Bells étant un album de rock progressif (oui ce genre est omniprésent dans mon classement), composé de deux morceaux (pour les deux faces du vinyle, format très classique dans ce genre musical), qui n'a rien d'horrifique, qui alterne le rock, le folk, les passages alambiqués voir un peu loufoque. Une œuvre assez immature mais qui justement en hérite un vent de fraicheur et de folie particulièrement bienvenus. Il poursuivra dans les grandes fresques ambitieuses de 2 fois 20 minutes jusqu'à l'apogée de sa première partie de carrière et le "fantastic" Ommadawn.
La seconde partie de carrière sera plus pop et comprendra les deux morceaux déjà cités. Et selon moi présente un intérêt bien moindre. Mais c'est en 1990, alors que la carrière de Mike Oldfield s’essoufflait un peu et que Richard Branson souhaitait qu'il sorte un Tubular Bells II pour renouer avec le succès qu'il sortit contre toute attente l’œuvre musicale à mon sens la plus fascinante de l'histoire de la musique (oui, je m'enflamme), Amarok. Un chef d’œuvre complètement fou, constitué d'un seul morceau de 60 minutes (et deux secondes...), constitué d'une multitude de thèmes (une cinquantaine) développés entre 13 secondes et 3 minutes 13 et joué à l'aide d'une cinquantaine d'instruments et bruitages. Mélange des influences (Rock, World Musique, Folk, Prog', Ambiant...). Le final en trois temps est d'une intensité incroyable et nous vide de toute émotion. Rien de comparable n'existe dans le monde de la musique, mais son côté anti commercial et son absence de promotion (Richard Branson n'apprécia pas du tout la plaisanterie, voir chronique) en fera un bide qui n'aura pas connu le succès qu'il mérite. Et pourtant derrière son approche élitiste, il contient des mélodies sublimes et faciles d'accès.
Mike Oldfield - Amarok
Il faut faire l'effort pour s'accrocher les 6 premières minutes, et après vous serez happé par la beauté du morceau.
Il est souvent pratique de dire que Queen a explosé à la face du
monde grâce à sa chanson Bohemian Rhapsody tant elle est hors norme, et
que son histoire peut ressembler a un conte de fée. Une chanson trop
longue et donc refusé par toute les radios et finalement diffusée par un
ami de Mercury sur Capital Radio, et là, le casse du siècle, les
auditeurs la redemandent encore et encore, elle passera ainsi jusqu'à 14
fois par jour. Depuis, de nombreux sondages font de ce single, le
meilleur morceau de l'histoire du rock, pas moins. Et parce que cela ne
suffit pas, on lui crédite la naissance du clip vidéo.
Et bien non, Queen n'a pas inventé le clip ; Une confusion venant
de la technique d'enregistrement de la vidéo, de façon électronique,
alors encore unique dans le monde de la musique. Et non Queen n'était
pas un petit groupe inconnu lorsque ce morceau est sortit. Ils avaient
déjà 3 albums à leur actif, qui avait bénéficié d'un succès croissant.
Le public était au rendez vous, les disques d'or aussi. Le premier
carton de Queen est plus a chercher dans Killer Queen, ou dans une
moindre mesure dans Seven Seas of Rhye extrait de ce qui est peut être
le meilleur album de Queen, Queen II, nous y voilà donc...
Un 1 an après un premier album plein de charme, Queen décida de se
débarrasser de ses influences qui commençaient en 74 a s'essouffler
quelque peu (Led Zep, Deep Purple, Uriah Heep, Yes...) pour créer un son
qui leur serait propre, une identité forte, ainsi est né Queen II, et
autant le dire tout de suite, c'est une véritable réussite. Entre Rock
Prog' et Hard Rock, ce disque d'une grande diversité est aussi l'un des
plus difficile d'accès. Il n'y a pas de tube formaté pour la radio.
L'album peut se décomposer en deux parties. La première composé en
grande partie par May est de très bonne facture. Avec un premier morceau
Father to Son où se mêle break acoustique et partie Hard rock inspiré. White Queen est un délicieux morceau épique. L'acoustique Some day one day vient apaiser le tout, avant le morceau Hard de Roger Taylor Loser In The End pas fou.
Et puis Mercury arrive et se charge de la seconde partie de l'album, nous
faisant passer d'un très bon album, à un espèce d'ovni musical
totalement jubilatoire. L'enchaînement Ogre Battle, The Faily Feller's Master Stroke, Nevermore, March of The Black Queen est tout simplement dément et peut s'apparenter à un seul morceau de rock prog' tant les transitions semblent naturelles.
Ogre Battle est un brûlot Hard Rock mélodique plein d'énergie, qui s'enchaîne avec The Faily Feller's Master Stroke
sorte de pépite totalement déjantée, mais tellement Queenesque. Le piano
qui lie ses morceaux se fait poète dans une ballade parmi les plus
belles du rock : Nevermore, qui en 1 min 20 a tout dit. Pour conclure le tout déboule le monumental March of The Black Queen,
morceau progressif et épique, où partie hard et break magnifique
s'entremêle jusqu’à ce qu'un Chœur s'envole vers la chanson suivante, Funny How Love Is, une petite sucette très joyeuse. Le tout se termine par le premier tube du groupe, Seven Seas oh Rhye si vous avez bien suivi, presque classique, mais tout aussi excellente.
Une des premières choses qui marque dans cet album, c'est son étonnante
cohérence, malgré son incroyable richesse. Tout s'enchaîne le plus
naturellement du monde. Et toutes ces chansons, du Hard Rock le plus
énergique à la ballade la plus calme sont estampillés Queen II. Le
travail de production est ici colossale, avec cette superposition de
pistes vocales et de guitares presque à l'infini, du jamais vu pour
l'époque. Le son Queen est né, pour le meilleur et pour ... le meilleur.
Tracklist
1. Procession
2. Father To Son
3. White Queen (as It Began)
4. Some Day One Day
5. The Loser In The End
6. Ogre Battle
7. The Fairy Feller's Master-stroke
8. Nervermore
9. The March Of The Black Queen
10. Funny How Love Is
11. Seven Seas Of Rhye
Membres
Freddie Mercury - Chant, Piano John Deacon - Basse Roger Taylor - Batterie Brian May - Guitare
En 1990, Mike Oldfield du haut de ses 20 ans de carrière à déjà tout
connu, la reconnaissance de ses pairs, avec quelques unes de ses œuvres
les plus accomplies (Ommadawn, Incantation...) et le succès populaire
comme le culte Tubular Bells, ou les Pop, To France et Moonlight
Shadows. Mais aussi quelques bides...
Alors qu'il devait beaucoup à Richard Branson (Patron de Virgin), le
premier à avoir cru en lui, et que réciproquement, celui ci devait à
Mike Oldfield son premier succès, des tensions entre les deux hommes
commencèrent à poindre. Ainsi, R.Branson désirait la
composition d'un Tubular Bells II, ceux que refusait, avec raison, le
troubadour Anglais. De ce contexte difficile, naquît Amarok*, l’œuvre
la plus excitante de la musique moderne, pas moins.
Il va de soi (comme l'avenir ne le montrera pas...) que Mike Oldfield n'a aucunement cédé à la pression de son
patron, bien au contraire, il proposa l'album le moins commercial
possible. Ainsi le disque ne comporte qu'une unique chanson de 60
minutes et 2 secondes, et chaque thème n'y est jamais exploité plus de
deux minutes, le tout lié par des bruits pour le moins incongrue, comme
ce F*** Of R.B dissimulé en morse. La plaisanterie ne fut pas au goût de
Richard Branson, Mike Oldfield fut alors prier de prendre la porte
après la sortie de cet album, qui ne bénéficia d'ailleurs d'aucune
promotion.
Et pourtant... Le patron de Virgin n'a pas eu beaucoup de flair, car
dénigrer une œuvre si visionnaire, peu nuire quelque peu à son image
auprès des mélomanes. Vous l'aurez compris, ce n'est pas un album que
l'on écoute d'une oreille distraite. L'album d'une structure chaotique,
multiplie les thèmes et les airs, sans qu'il ne semble y avoir de fil
conducteur. Une cinquantaine d'instruments composent ce morceau ! La
brosse à dent et le verre d'eau côtoient ici la guitare électrique. On y
trouve quelques instruments exotiques, comme le Ukulele, le Kalimba, le
Timpani... Mike Oldfield s'occupe d'ailleurs de pratiquement tout ces
instruments, pas question de multiplier les musiciens de session, ou
d'utiliser des samples. Les ambiances tissés sont donc multiple, donnant
une couleur World Musique à l'ensemble, un peu à l'image d'Ommadawn. On
retrouve les rythmiques africaines en fil rouge dans le final, où des
airs celtiques, assuré par Paddy Moloney qui re-collabore à l'album,
pour notre plus grand plaisir. Mais la ressemblance s'arrête là, si
Ommadawn ne faisait que suggérer la folie, Amarok en est affecté jusque
dans sa structure.
Des bribes de Folk, ou de Country par ci, des ambiance New Age par là.
Pas mal d'Ambiant, du Blues, et de la World musique comme vue
précédemment, celtique, africaine, australienne, hispanique... L'album
est d'une diversité incroyable, ce qui en rebutera plus d'un. Mais au
fil des écoutes, l'auditeur voit sa récompense arrivée. D'abord se
dégage quelques mélodies sublimes, comme ce solo de guitare autour de la
sixième minute, dont l'air sera repris et déformé plusieurs fois dans
le morceau. Un lien entre chaque parties va commencer à se dégager, les
enchaînement sembleront plus naturel, subtile. On appréciera de plus en
plus l'intelligence sous-jacente à la construction de ce morceau. On
remarquera certains airs fil rouge, qui seront repris à plusieurs
reprises, sur lesquels se raccrocher, mais qui évolueront au cours de
l'oeuvre.
Et ce final, qui s'étale sur plus d'un quart d'heure, structuré autour
de ces rythmiques africaines si envoûtantes. Les dernières minutes
seront consacrées à un crescendo, où les choeurs s'élèvent jusqu'à
atteindre ces dernières notes de guitare limpides, d'une beauté
transcendante mais non dénouée d'un puissant impact. Un peu à l'image
d'un roman où d'un film, ce final, après une oeuvre si longue, nous
laisse dans une torpeur mélancolique, sensation que ne procure aucun
autre album.
Mike Oldfield signe donc avec cet Amarok son album le plus
expérimental, le plus difficile d'accès, mais surtout le plus fascinant.
Un chef d'oeuvre !
*Amarok est une divinité Inuit, l'esprit d'un loup géant. C'est
aussi un art martial asiatique. Enfin, l'album à donné le nom à un
logiciel de musique sous Linux. Vous pouvez d'ailleurs vous amuser à
écouter l'album sur ce logiciel, et y lire le petit message qui s'y
affiche.
Tracklist
1- Amarok
Membres
Mike Oldfield - Tout
+ Paddy Moloney
+ Janet Brown
Plus qu'une simple chronique, cet album In the Silence est l'occasion de soulever un certain nombre de réflexions sur la domination de l'anglais sur le marché de la musique et la difficulté pour des "petits pays" comme l'Islande d'exporter leur culture en la gardant intact. Pourquoi en parler pour ce second album d'Asgeir ? Tout simplement car In The Silence est en réalité la simple traduction en anglais de son premier album Dýrð í dauðaþögn. Pas besoin d'être un génie pour comprendre l'intérêt de cette traduction, imaginez vous en soirée en train d'évoquer votre dernière découverte musicale :"Hey ! T'as écouté l'album d'Asgeir, Dirss i deuïthamachinchose, il est trop bien !" Le problème ici, c'est que ce n'est pas seulement le titre qui a été traduit, mais l'intégralité des paroles des chansons.
Avant de me lancer plus avant dans le décryptage de cet album, il est bon de rappeler dans quel contexte il a été composé pour donner un peu plus de relief au choix de cette traduction.
L'Islande est un point chaud de la littérature mondiale, où s'est épanouie un fameux genre littéraire, les sagas (mots que la langue française à emprunter à l'Islande et qui signifie récit), qui narrent l'histoire de personnages illustres - des rois norvégiens dans les sagas des rois norvégiens ou d'illustres explorateurs ou conquérants dans les sagas islandaises - de leur naissance à leur mort, sans oublier leur important lignage et en intégrant parfois des éléments fantastiques et mythologiques (sagas légendaires). Même si ces récits sont en parties, voir pour certains quasiment intégralement, fictionnels, ils apportent une mine d'informations sur les modes de vies de l’époque. On sait d'ailleurs que nombre de ces nordiques étaient d’habiles poètes qui composaient de la poésie scaldique. On peut citer également l'Edda poétique, notamment la Völuspa, qui avec l'Edda en prose de Snorri Suturlson sont les plus importantes ressources à notre disposition pour comprendre la mythologie nordique. Encore actuellement, l'Islande est célèbre pour ses thrillers baignés dans l'ambiance si particulière de ce pays mais possède une littérature variée que l'on ne peut limiter à ce seul genre et nous revenons doucement à notre sujet initial.
Car ce premier album est avant tout une belle histoire, celle d'un jeune homme qui tarde à s'ouvrir à la civilisation dynamique de Reykjavik, la capitale et qui reste très attaché à ses origines rurales dont on perçoit le calme et la paix dans sa musique. Mais c'est aussi un rapprochement avec son père, poète apprécié en Islande, qui lui a écrit toutes ses paroles. Il faut aussi rappeler l'attachement des islandais pour leur langue (Íslenska), la fierté de sa pureté, elle qui n'a que très peu évolué depuis plus d'un millénaire et se rapproche du vieux norrois, la langue scandinave médiévale.
Pour toutes ses raisons, on comprend aisément que cette démarche de traduire les paroles de son père, de dénaturer la sonorité si particulière de l'islandais, pour s'exporter et s'imposer aux restes du monde n'avait rien de naturel. Mais on comprend le choix du producteur, l'islandais étant une langue obscure, imprononçable pour le public étranger et aux accents rugueux pas forcement vendeur. La plupart des succès musicaux islandais ont été produits dans la langue de Shakespeare (Björk, Of monsters and men, Jón Jónsson...). Sigur Ros en est un contre exemple - me direz vous, ou pas, vous faites ce que vous voulez - Mais le succès de Sigur Ros à l'étranger s'explique - outre leur talent, qu'ils partagent avec d'autres - par un certains nombre de facteurs favorables :
- Il ne s'agit pas de chansons à texte, les paroles sont là comme instrument et le sens importe peu. D'ailleurs un bon nombre de chansons sont écrites en Volenska, langue imaginaire qui ne veut rien dire.
- Liée à cette absence de sens, la musique de Sigur Ros est universelle, la mélodie seule réveille des émotions que chacun peut ressentir, indépendamment de sa langue.
- Sigur Ros s'est exporté à l'étranger après avoir fait ses preuves dans son pays, albums après albums, et surtout s'est fait connaitre en partant en tournée avec Radiohead.
Pour Asgeir, c'est un tout autre contexte. Après un seul album, qui a connu certes un succès fulgurant et inédit en Islande (meilleure vente pour un premier album), Asgeir était absolument inconnu à l'étranger et c'est un label londonien (qui avait déjà repéré Björk) séduit, qui a parié sur lui pour l'exporter à l'étranger. Loin de moi l'idée de faire une leçon de marketing, c'était sans doute la meilleure solution que de le faire enregistrer en anglais et le succès qu'a rencontré l'album en est la preuve.
Mais quand est-il des conséquences sur la qualité artistique de l'album ? Le traducteur, John Grant, s'est attaché au mieux à respecter le sens des paroles (et mon niveau d'islandais m'interdit évidemment de vérifier la qualité de cette traduction), intention louable, mais faite parfois à l'encontre de la musicalité des paroles, renforcé par la diction d'Asgeir, moins à l'aise avec l'anglais, ce qui donne à l'ensemble un côté moins naturel, plus haché, quelque peu dommageable. On perd aussi en nuance, ou la voix légère d'Asgeir et son timbre profond colle parfaitement avec les subtilités de l'islandais, tantôt rugueux, tantôt délicat, riche en sonorité variée. D'un autre côté on peut se réjouir que la traduction du texte, même si on en perd le rythme et la mélodie (l’éternel problème dès qu'il s'agit de traduire un poème, exercice au combien périlleux) permet de faire découvrir un texte qui sinon aurait été inaccessible au profane. Regrette-t-on la traduction de l'Edda de Snorri Suturlson ou de la Völuspa ? Qui en France est capable de les lire dans leur version originale ?
Et si les sonorités de la traduction peuvent paraître moins naturelles, c'est avant tout par comparaison directe avec la version islandaise. Mais prit indépendamment, ce In The Silence est un bijou, mais Dýrð í dauðaþögn est juste un peu meilleur. Que ce soit l'une ou l'autre version, il est temps d’arrêter cette digression et de parler de la musique. Et il n'y a pas tant à dire. C'est un album de folk/pop, teinté de notes électro intégré intelligemment, aux accents heureux et chaleureux, porté par la voix aérienne et reposante d'Asgeir. Les chansons s'enchainent sans accroc, on se laisse transporter par les mélodies délicates et positives, pour 40 minutes enchanteresses. Cet album mérite clairement son succès. Et pour ne rien gâter, vous trouverez la version deluxe de l'album, comprenant les deux versions, pour à peine plus cher que le seul In The Silence, de quoi s'ouvrir à cette merveilleuse langue qu'est l'islandais. Vous n'aurez plus qu'à vous blottir au coin du feu et apprécier.
Je vous laisse vous faire votre propre opinion en écoutant les deux versions de son principal tube :
King and cross
Leyndarmál
Pour la suite, il y a fort à parier, pour les raisons déjà évoquées, pour l'attachement à la langue, à la culture, à ses racines et tout simplement à son père, qu'il retourne chanter dans sa langue natale. Et le succès de In The Silence lui a sans doute ouvert une popularité suffisante pour acquérir une certaine liberté pour son prochain album. La sortie de Dýrð í dauðaþögn aux États-Unis, dans sa version originale, semble aller en ce sens. Bæ !
Après le succès mitigé de Með..., Sigur Rós retourne à la musique qui a fait son succès, le post rock. L'instrumentation est de nouveau plus variée, avec le retour d'une sonorité plus électrique mais discrète. L'ensemble garde le côté épuré entrevu sur les balades du précédent album. La musique dans sa construction reste simple sans être simpliste et renforce l'ambiance mélancolique, plus lourde pour un résultat touchant et sincère. Aucune balade enfantine ou rigolote ne vient ternir l'atmosphère de l'album, qui pourrait s'avérer pesante, si elle était dénuée d'une note d'espoir, présente comme souvent chez Sigur Rós. On y retrouve un des plus beaux morceaux du groupe, Varuð, qui à l'instar d'un Untitled #8 ou d'un Glósóli reproduit cette structure basée sur le contraste entre passage aérien et montée en puissance. Ici c'est la batterie qui vient apporter du poids et du rythme à l'envolée lyrique des chœurs pour un résultat encore plus intense et émouvant.
Cet album est également accompagné de la sortie d'un dvd qui regroupe une série de courts métrages réalisés par plusieurs réalisateurs différents mettant en image les chansons de Valtari : Le Valtari mystery film experiment et c'est sans surprise Varuð qui est le plus mis à l'honneur. La version de Ingibjörg Birgisdóttir est la plus simple, présentant une carte postale animée, où des silhouettes viennent se positionner dans les falaises avec des lampes torches, qui s'allument en même temps que la musique gagne en intensité. Je vous l'avez déjà présenté sur mon focus sur la musique islandaise et je ne peux m’empêcher de vous redonner le lien en fin d'article. Je ne vais pas aller plus en avant dans l'analyse cinématographique de cette œuvre, ce n'est pas ma spécialité. Il est juste intéressant de constater qu'une même musique peut inspirer des images très différentes selon les réalisateurs, chacun y ressentant des émotions différentes. Cette capacité à nous toucher personnellement, à faire écho à nos propres sentiments est sans doute la principale force de Sigur Rós.
Kveikur - Rock - 2013
Fin de cette rétrospective avec Kveikur, dernier album en date de Sigur Rós. Si Valtari avait pu décevoir certains par son côté très minimaliste et assez peu original, Kveikur marque quant à lui une rupture assez nette dans la discographie du groupe. Les difficultés de composition de Valtari, ainsi que le départ d'un des membres du groupe, Kjartan Sveinsson explique sans doute ce changement de cap.
Kveikur est un album plus sombre et violent, qui se rapproche de Von. Sigur Rós fait toujours du post-rock, mais les passages planants sont réduits au minimum, pour ne conserver qu'une instrumentation qui vient alléger des passages pop et rock.
L'ensemble sonne plus spontané, moins réfléchi, pour un résultat plus accrocheur et rythmé, plus facile d'accès. Ce changement dans la construction des morceaux n’altère pourtant pas la capacité de Sigur Rós à créer de l'émotion. Les atmosphères sont toujours aussi présentes et, là encore comme pour Von, on alterne chansons sombres et lourdes avec des musiques plus légères. Si l'instrumentation et la construction des morceaux ont beaucoup évolués, l'âme et le cœur de la musique reste identique.Les morceaux Brennisteinn (lien en bas de page - morceau rendu célèbre par ces nombreuses utilisations à la télé) et Kveikur représentent parfaitement cette nouvelle orientation.
Kveikur est donc un album de rock ciselé comme une pièce d’orfèvre, riche et varié, et d'une grande beauté. Il apporte un vent de fraicheur à la discographie de Sigur Rós qui avait baissé en qualité après les deux grandes œuvres qu'étaient ( ) et Takk...
Bonus : Si vous avez la version deluxe, elle est fournit avec un vinyle 10" bonus de 3 chansons, un remix de Brennisteinn angoissant à souhait et deux morceaux figurant dans un EP promotionnel ayant accompagné la sortie du single Brennisteinn.
Pour résumer, je ne me suis pas lancé dans une analyse précise de la musique de Sigur Rós, car elle ne se raisonne pas, elle ne se prête pas à de grandes études, il n'y a pas de grands concepts, juste une volonté de faire une musique touchante et interprétée par chacun d'une manière différente. C'est pour cela que mon avis sur un album ne peut être considéré comme universel, il s'agit bien de mon ressenti personnel et à ce petit jeu, je vous propose mon top 3 de mes albums de Sigur Rós préférés.
3 - Kveikur
2 - Takk...
1 - ( )
Et si je devais faire découvrir le groupe, mon choix se porterait sur Takk... plus facile d'accès.
Ainsi s'achève cette rétrospective, bonne année et à bientôt pour de nouvelles aventures musicales.
Suite de la rétrospective sur la carrière de Sigur Rós, on attaque avec le quatrième album studio du groupe. L'épisode précédent, c'est par ici.
Takk... - Post Rock - 2005
Après la grande réussite que fut (), Sigur Rós décide de jouer dans la continuité, gardant cet équilibre entre mélodie mélancolique et passage rock énergique. Glósóli astucieusement placé en tout début d'album jette un pont entre () et Takk...,
où l'on retrouve cette construction qui progresse d'une mélodie simple
et belle à l'arrivée des guitares rugissantes lors d'un final scotchant. Mais les nuances avec le précédent sont de tailles. Les ambiances tissées sont toujours aussi belles, mais moins sombres, empruntent d'une lumière, d'une note d'espoir qui réchauffe le cœur comme sur le magnifique Hoppípolla. Même dans la production et le choix des instruments, la musique dégage une forme de chaleur réconfortante. La palette des instruments s’élargit également avec la présence plus soutenue de Amiina, quatuor à cordes qui les accompagnera lors de la tournée qui suivra la sortie de l'album. Takk... perd un peu en profondeur, le ton se fait plus léger et sa construction moins ambitieuse. Mais les morceaux gagnent en autonomie et en efficacité. Le choix de ne pas nommer les chansons de () illustrait cette volonté de produire un album uni où chaque chanson faisait partie d'un tout et perdait de son intérêt isolée. Au contraire de Takk... où les pistes peuvent s'écouter séparément sans perdre de leur force, comme pour Sé lest, Sæglópur et Milanó qui forment le cœur de l’œuvre.Au final, ces deux albums sont très proches, on ressent très clairement la patte maintenant bien affirmée du groupe, mais cette même musique est traitée avec une volonté, une ambition très différente.En résultat l'apogée du groupe, avec leur deux meilleurs albums.
Hvarf/Heim (EP) - Post Rock / Rock Acoustique - 2007
Ep réunissant deux enregistrements, le premier Hvarf (disparu), composé en studio propose des chansons inédites et des reprises de vieux morceaux réarrangés, le second Heim (Maison) est un concert acoustique, enregistré dans le café Gamla Borg devant des amis du groupe.
Les trois premiers morceaux sont inédits et ils auraient été dommage d'en être privé. Sigur Rós reste dans la veine de ses précédents albums, ne révolutionnant pas sa musique, mais renforçant ici l'aspect rock, sans toutefois négliger les ambiances toujours aussi émouvante, toujours mélancolique, mais aussi plus sombre, comme sur Hljómalind, sublime et puissant. On monte encore en intensité avec Í Gær, déchirante. La suite est d'un intérêt moindre, non pas à cause d'une baisse de qualité des morceaux, mais parce qu'il s'agit de reprise de précédents morceaux, soit remixés, soit en concert acoustique. Dans les deux cas, l'apport par rapport aux versions originales est trop faible pour faire de cet EP un indispensable du groupe.
Með suð í eyrum við spilum endalaust - Folk/Pop - 2008 Pour éviter de souffrir de la difficile comparaison avec les deux précédents albums - () et Takk... - assez proches finalement, Sigur Rós décide pour ce Með suð í eyrum við spilum endalaust (assez difficile à caser en soirée) de prendre son auditoire à contre pied, avec un album très léger. On alterne entre balade folk paisible (Góðan daginn) et chansons plus pop et joyeuses, voir enfantines (Gobbledigook). Il s'agit également de leur premier album contenant une chanson en anglais All Alright, tentative sans doute de toucher un plus large public qui pourrait être rebuté par les sonorités rugueuses et un peu archaïque de l'Islandais (Íslenska) ou du Vonlenska. Il faut attendre Festival, morceau très épuré où Jónsi se retrouve accompagné de très légères nappes de clavier dans une ambiance quasi religieuse, avant une classique montée porté par la batterie et la guitare pour retrouver le style des précédents albums. Mais ici, la sauce ne prend pas et la chanson sonne un peu creux. Au final, rien de désagréable, mais un album peu profond, trop léger et épuré pour être d'un réel intérêt.
J'ai volontairement "oublié" deux EP : Ba Ba Ti Ki Di Do, pas des plus passionnant et Rimur que je ne possède pas.
Épisode suivant :Valtari et Kveikur. Sigur Rós retrouvera-t-il le feu sacré après le décevant Með... ?
Prochaine rétrospective, on reste dans le nordique, mais on part en Suède, avec Fredrika Stahl.
Si Sigur Rós est reconnu dans le monde entier pour sa musique unique, mélange de plage ambiante d'une grande beauté et de montée en puissance rock, beaucoup ont été surpris par le virage plus sombre de Kveikur, dernier album en date. L'occasion pour moi de faire une rétrospective de la carrière du groupe et montrer que, malgré une musique et un ton assez identifiable, Sigur Rós a su évoluer au cours de sa carrière et que certaines de ses facettes sont injustement méconnues.
Von - Post Rock - 1997
Ce premier album est très surprenant au regard de la suite de la carrière du groupe. Si l'étiquette fourre tout de Post Rock est accolée au groupe, c'est sans doute cet album qui le mérite le plus. Il s'ouvre sur une plage longue, angoissante et malsaine, qui aurait sa place comme introduction d'un album de Bathory, seul son final plein d'espoir qui vient déchirer le voile de ténèbres nous rappelle qu'on a bien à faire à du Sigur Rós. La suite est des plus éclectique, mais reste très rock dans son instrumentation et dans sa philosophie. Entre le violent Hún Jörð et le morceau suivant entrainant et aérien, c'est un album très énergique, mais dont le ton change constamment, parfois léger et plein d'espoir (c'est la signification du mot Von), parfois carrément glauque. De ce premier album, il n'en reste pas grand chose dans la suite de la carrière de Sigur Rós. Le rapport passage Rock/Ambiant sera complétement inversé, l'atmosphère oppressante sera remplacée par une musique plus légère et mélancolique. Ne reste que le langage de Jonsi, qui porte le nom de cet album, le Vonlenska, réutilisé par la suite. Un ovni musical, qui de par sa différence en fait un indispensable du groupe, qui ainsi ne souffre pas de la comparaison avec les pièces suivantes. Un album exigeant, qui ne se laisse pas apprivoiser facilement, mais d'une grande richesse et d'une grande beauté, qui s'avère être l'une des plus grandes réussites du groupe.
Ágætis byrjun - Ambiant/Electro - 1999
Après Von vendu à 313 exemplaires l'année de sa sortie, Ágætis byrjun pose les jalons du ton Sigur Rós et sera le premier vrai succès du groupe, renforcé par l'album suivant (). Par rapport à Von, l'instrumentation rock disparait presque complétement, au profit de touches électro légères qui viennent renforcer et rythmer l’acoustique dominant. L'album est presque exclusivement ambiant, tissant des mélodies tristes et joyeuses à la fois, emprunt d'une grande nostalgie, comme lorsque l'on regarde s’éloigner un ami et que l'on se remémore avec un sourire les bons moments passés ensemble, sans savoir si on le reverra, où si c'est un adieu. Chaque chanson prit séparément est un petit bijou qui nous enveloppe d'une douceur cotonneuse, un pur moment de détente, mais au sein de l'album, elles sonnent toutes comme une fin, un au revoir, ce qui donne à l'ensemble un côté répétitif, sans fin et c'est la principale faiblesse de cet album qui reste néanmoins très agréable à écouter.
( ) - Post Rock - 2002
Si () est dans la continuité de Ágætis byrjun, qui avait jeté les véritables bases de la musique de Sigur Rós, () réimplante un caractère plus sombre et rock à la musique, mais en touche beaucoup plus discrète que sur Von. Un dosage subtil qui permet à ces passages de créer un climax d'une intensité folle, qui fait de cet album, disons le tout de suite, le meilleur de Sigur Rós, et l'un des plus grand de ce début de siècle.
On pourrait diviser cet album en deux parties, la première ambiante, mélodique, magnifique, à s'en faire dresser les poils sur les bras, voir à verser quelques larmes, si on l'écoute dans un état d'esprit déjà mélancolique et la seconde plus énergique, des chansons tout en progression qui tendent vers une explosion finale. Mais là où réside la force de cet album, c'est dans sa construction, où cette progression au sein des chansons se retrouvent également tout au long de l'album, qui ne cesse de gagner en intensité. Il n'y a pas de césure marquée mais une transition logique, en douceur vers les deux pôles de l'album. On arrive au dernier morceau complétement désarmée, la sensibilité à fleur de peau, pensant déjà avoir tout entendu et c'est là qu'arrive ce climax, que Sigur Rós a mis plus d'une heure à construire. On touche au sublime et à la grâce, la musique pénètre notre âme et on sort de cette écoute touché, marqué à jamais. Plus qu'un album, c'est une expérience à vivre, un de ses rares albums qui transcendent la musique.
Prochains épisodes :
(2/3) - Takk, Hvarf/Heim, Með suð í eyrum við spilum endalaust
(3/3) - Valtari (+The Valtari Mystery Film Experiment), Kveikur
Retour sur la carrière hautement qualitative de Bang Gang, projet auto-centré autour du talentueux Barði Jóhannsson, dont j'avais déjà évoqué rapidement la carrière ici. De 1998 à 2014, Bang Gang n'a sorti que 3 albums, mais ce n'est pas forcement, à l'image d'un Laurent Voulzy (oui j'ose la comparaison...), parce que Barði prend son temps pour peaufiner à l'extrême sa musique, mais de nombreux autres projets l’accaparent (Lady & Bird, Starwalker, de nombreuses de BO de film et séries...). Si bien qu'au fil des années, Bang Gang apparait presque comme l'un de ses projets secondaires.
You - Trip Hop - 1998
Premier effort du jeune Barði Jóhannsson, qui en est au début de sa carrière musicale, que ce soit au sein de Bang Gang, ou de ses autres projets qui ne seront possibles qu'en partie grâce à la notoriété que ce premier album lui apportera. Contrairement à la suite de sa carrière, il n'est pas difficile de cerner les contours de cette musique, du Trip Hop spontané, très bien produit, porté par le duo Barði/Esther Talia Casey à la voix qui marche à merveille. Les chansons sont tantôt très rythmés, accrocheuse, tantôt plus aérienne et sombre, où les deux à la fois, comme So Alone, petit bijou irrésistible. La première moitié de l'album frise la perfection, jusqu'à Sleep, mais le manque de renouvellement de la musique peut créer une petite lassitude sur la seconde moitié, bien qu'elle aussi très qualitative. Un album qui sans révolutionner le genre, montre déjà les très fortes prédispositions de Barði à composer de puissante mélodie.
Something Wrong - Pop électro-accoustico-symphonique... - 2003
Il faudra attendre cinq ans de plus pour la sortie de l'opus suivant, qui propose un changement radical de son. Barði Jóhannsson abandonne le Trip Hop et ambitieux, souhaite inclure tout son univers musical en un album. Les sonorités électriques laissent parfois place à une instrumentation acoustique, où à des plages orchestrales, comme le magnifique thème de There was a whisper, qui sera repris dans sa BO d'Haxan Le tout drapé dans une atmosphère doucement mélancolique. On tutoie les étoiles sur la somptueuse chanson d'ouverture Inside qui côtoie des chansons plus fades comme Follow ou la niaise Stop in the name of Love. On retrouve le tube Find What You Get, ultra-efficace mais qui dénote avec le reste de l'album et qui aurait bien plus sa place sur Ghost form the past. Ou encore la chanson titre, qui elle se rapproche plus de l'esprit du premier album. Bref, un album fourre-tout, bourré de bonnes idées, mais dont l'incohérence et la qualité inégale déçoivent un peu.
Ghost from the past - Pop Rock - 2008
Ce dernier album, à l'heure où j'écris ces lignes, peut être décomposé en deux parties. La première, propose un pop rock simple, mélodique et accessible, qui s'il ne brille pas par son originalité ni sa profondeur, aura le mérite de ne fâcher personne. Mais le disque prend de l'ampleur à partir du 5ème morceau totalement instrumental, Lost in Wonderland, énergique et planante à la fois, qui marque l'entrée dans la seconde moitié de l'album, plus sombre, plus violente parfois, mélancolique également. Le morceau Ghost From the Past est un petit bijou, et l'album s'achève presque (il restera un dernier court et planant morceau de conclusion) par You Won't Get Out, dont l'instrumentation et sa construction tout en progression, où la guitare électrique prend une part de plus en plus importante, n'aurait pas dénoté dans un album de Sigur Rós. Si le changement d'orientation musical amorcé avec le précédent opus avait été parfois maladroit, sur ce troisième effort, Barði Jóhannsson fait preuve d'une bien plus grande maitrise et nous offre une pop minimaliste (guitare-piano-voix) émouvante et magnifique. Le meilleur (pour le moment) de sa discographie.
Bananamour sortit en 1973 est son quatrième album solo. Pour l'occasion, il fait peau neuve, s'entourant d'Archie Legget à la basse et Eddie Sparrow à la batterie en lieu et place de Dave Dufort. C'est au tour de Steve Hillage de remplacer Mike Oldfield à la guitare, ce dernier étant en plein enregistrement de son premier album Tubular Bells. Dave Bedford et Robert Wyatt sont toujours présents.
SiWhatevershebringswesing brillait par sa richesse, mélangeant genres, tons, rythmes... Bananamour se veut plus cohérent. Un rock plus calibré, plus accessible, plus mélodique, laissant moins de place aux expérimentations angoissantes ou psychédéliques. Des chansons (la voix est très présente) rock légères, qui fleure bon les sixties (oui, nous n'y sommes plus...). Ce n'est pas pour autant que Kevin Ayers perd ici de son intérêt, la première face est une franche réussite, c'est accrocheur, enjoué, très mélodique, et l'instrumentation maitrisée et parfaitement pensée. Shouting in a Bucket Blues résume bien ce constat, le duo voix/guitare fait merveille et il est difficile de résister à ce tube en puissance. Interview propose la seule petite incartade vers une musique plus psychédélique.
La seconde face retrouve (un peu) un côté hétéroclite, avec le progressiste et ambitieux Décadence, et son excellent final instrumental qui côtoie le mutin ou la comptine. Mais il faut avouer que sortit de ce premier morceau, cette seconde face perd en intérêt, où une trop grande légèreté de la musique n'arrive pas à être compensé par des mélodies trop simples pour distraire.
Si comme moi, vous louez l'époque 68-73 pour ce vivier créatif extraordinaire qui vu l’émergence d'une scène dynamique et avant-gardiste, Whatevershebringswesing vous apportera plus de plaisir, sinon, ce Bananamour est une bonne porte d'entrée à la musique de Kevin Ayers et donc à l'école de Canterbury et ses nombreuses merveilles. Il réussit à être un excellent album jusqu'à sa sixième chanson, avant de baisser en intérêt.
Musiciens :
Kevin Ayers - Voix, Guitare, Basse, PianoArchie Legget
- Basse, Voix Eddie Sparrow - Batterie Mike Ratledge - Orgue David Bedford - Claviers
Robert Wyatt - Voix
Tracklist :
Face 1 1 - Don't Let It Get You Down 2 - Shouting In A Bucket Blues 3 - When Your Parents Go To Sleep 4 - Interview 5 - Internotional Anthem
Face 2 6 - Decadence 7 - Oh! Wot A Dream 8 - Hymn 9 - Beware Of The Dog
On ressort de la cave une double ration de Kevin Ayers, avec la compilation regroupant deux albums Whatevershebringswesing et Bananamour, qui a eux deux voient l'intervention de quelques grands noms de la scène prog', déjà bien affirmés ou en devenir. La mode des "guests" existaient déjà à l'époque, mais ici, il s'agit de bien plus que cela, puisqu'on touche à l'école de Canterbury, qui fera l'objet d'un focus sur ce blog dans un avenir proche.
Première partie de cette chronique, nous allons évoquer le cas Whatevershebringswesing. Premièrement, pourquoi ce nom ? Je ne le sais pas ! Ça c'est fait... Au regard de cette formation éclectique, entre membres de Soft Machine, de Gong ou de sa précédente troupe The Whole Word on peut s'attendre à une musique diversifiée, voir chaotique. Et c'est le cas, entre les arrangements déstructurés et angoissants de David Bedford (décidément, on ne rigole pas tout les jours en écoutant sa musique), les mélodies sublimes et apaisantes portées par les guitares de Mike Oldfield ou les flutes et le saxo de Didier Malherbe. Dès le premier morceau, la richesse est à l'honneur, et colle à la personnalité exubérante de Kevin Ayers, comme sur Oh My, chanson très légère, qui fleure bon l'herbe, et que ne renierait pas Gong. Song From The Bottom Of A Well est en totale rupture avec la musique proposée précédemment et s'avère particulièrement sombre voir malsain, porté par une voix grave plus parlée que chantéeet par des rythmiques répétitives qui donnent un aspect presque incantatoire à la musique.
Ce gros meltingpot se poursuit sur la face B qui s'ouvre sur des chœurs et une mélodie gentiment mélancolique. Une balade champêtre où la voix grave de Kevin Ayers se mêle avec harmonie à celle plus sensible de Robert Wyatt. Le solo tout en douceur de Mike Oldfield s'accorde parfaitement à l'ambiance de cette chanson.
Ou encore sur ce Champagne Cowboy Blues, très lent, où Kevin Ayers nous interpelle régulièrement, et semble pour une raison que je vous laisse imaginer assez fatigué, et où la mélodie de Mike Oldfield apporte une tristesse à l'ensemble, et qui est interrompu joyeusement pendant un court moment par une fanfare.
De par ses grandes variétés de ton, d'ambiance, d'instrumentation... cet album est d'une grande richesse, même si certains enchainements peuvent choquer, et rendre l'ensemble assez incohérent. On n'a pas affaire à un album concept, mais juste un assemblage de très bonnes chansons qui nous offre chacune une expérience différente.
Musiciens :
Kevin Ayers - Voix, Guitare, Basse, Piano
Mike Oldfield - Guitare (Solo), Basse
David Bedford - Claviers
Didier Malherbe - Saxophone, Flûte
Dave Dufort - Batterie
Robert Wyatt - Voix
Track List :
Face 1 :
1 - There is loving amons us there is loving
2 - Margaret
3 - Oh My
4 - Song from the bottom of a well
Face 2 :
1 - Whatevershebringswesing
2 - Stranger in blue suede shoes
3 - Champagne cowboy blues
4 - Lullaby
Si David Bedford est connu pour ses collaborations avec des musiciens rock comme Kevin Ayers ou Mike Oldfield, ce dernier jouant dans l'album présenté ici, ce Star's End n'a rien d'un album Rock accompagné d'un orchestre, comme les Queen, Scorpions et autres Metallica ont pu réaliser. On est à la croisée des chemins entre le psychédélisme de la fin des années 60 et la suite des Planètes de Gustav Holst.
L'album s'ouvre sur une introduction tout en dissonance, psychédélique, légèrement angoissante. Le ton est donné. La première face prend le temps de se construire, de faire apparaitre au fur et à mesure ses instruments qui s’additionnent autour d'une structure répétitive où les cuivres omniprésents poussent des plaintes lancinantes et provoquent un certain malaise à l'écoute, le tout rythmé par quelques montées en puissance sous acide. A l'écoute, on ne peut s'empêcher d'avoir les images de 2001, l'Odyssée de l'espace en tête. On ressent cette même sensation d’étouffement et de vertige à la fois devant l'immensité de l'univers, et cette solitude devant l'obscurité cosmique. La musique s'avère assez simple dans sa construction, une introduction, une plage centrale planante qui progresse vers un final soutenu par la guitare cristalline de Mike Oldfield, qui bien qu'agréable, n'apporte pas grand chose à la richesse et l'expressivité des différentes instruments de l'orchestre.
Le seconde face prend un parti légèrement différent et s'avère d'une plus grande profondeur. L'atmosphère reste angoissante, mais le rythme s’accélère, les harmonies laissent place à un désordre apparents, et le compositeur, ou l'auditeur, selon votre optimiste semble plongé dans la folie, comme si le choc du voyage dans l'espace, de l’oppressante solitude lui avait fait perdre la raison. Le calme revient alors, et apaisée, la musique se fait plus douce, susurrante parfois, avec quelques réveils, légers éclats, avant de retomber dans une sorte de léthargie. Et c'est lorsque l'on se le croit à l’abri, que la frénésie des cuivres et des cordes reprend soudainement pour une dernière montée d’adrénaline avant de s'étendre aussi vite. Les instruments semblent alors agoniser dans un quasi silence trompeur avant de venir triompher dans une mélodie superbe pleine de majesté et de fierté, marquant le dernier sursaut d'une étoile mourante qui nous gratifie d'un dernier levée de soleil réconfortant avant de s'étendre définitivement. Il ne nous reste plus qu'à contempler les ruines et les traces de la lutte de l'astre, seul dans l'immensité glacée à attendre notre fin, privée de toute lumière, dans un final calme et résigné.
Avec Star's End, David Bedford à respecter sa promesse, une musique très expressive, qui nous transporte dans l'espace glacial et nous permet d'assister à la mort d'une étoile. Tout un programme, qui s'il n'inspire pas la joie de vivre, nous propose de belles mélodies et de beaux moments contemplatifs. Si ce Star's End ne s'offre pas à la première écoute, et peut même s’avérer éprouvant pour ceux qui ont l'habitude de musique plus entrainante et joyeuse, il apportera beaucoup de plaisir aux autres qui feront l'effort de s'y immerger complétement.
Tracklist :
Face A : Star's End - 23'18"
Face B : Star's End - 22'26"
Musiciens :
David Bedford - Compositeur
Mike Oldfield - Guitares
Chris Cutler - Percussions
Orchestre Royal Philharmonique
Je vous ai déjà parlé du projet Kiasmos dans un billet précédent, il est temps dans dire un plus sur leur premier album éponyme. Petite piqure de rappel, Kiasmos est le projet de deux hommes : Ólafur Arnalds (Islande) et Janus Rasmussen (Iles Féroé), soutenu par le label Erased Tapes, dénicheur de talents. Les deux musiciens sont connus pour avoir déjà touché à l’électro, le premier en le mêlant à des sonorités plus classiques et acoustiques, et le second ayant une fibre plus pop.
L'album nous ai vendu comme un album de techno. Sans rentrer dans les détails du style et dans une classification alambiquée, on y retrouve effectivement une rythmique très présente, très lourde et grave propre au genre, qui donne un côté répétitif qui n'est pas sans rappeler des œuvres minimalistes.
Mais l'album se construit autour de la dualité entre cette rythmique très marquée et des mélodies légères, aériennes qui tissent une ambiance atmosphérique ; le curseur se déplaçant d'un pôle à l'autre pendant toute la durée de l’œuvre. Le propos reste toujours simple, des mélodies accrocheuses, des atmosphères enveloppantes et envoutantes, des rythmes puissants et répétitifs, comme sur Looper construit autour d'un air de piano minimaliste sur lequel se greffe des percussions entrainantes qui se développent et gagnent en intensité. On retrouve cette progression également à l’échelle de l'album, où les vapes mélodiques se font plus insistantes, plus envahissantes, et enrichissent l'album, le chargent en émotion. L'instrumentation plus classique gagne du terrain, le piano d'Ólafur, évidemment, où les violons mélancoliques dans le final de Throw. Ce changement de cap atteint son apogée sur les trois dernier morceaux, le mélancolique Dragged, le plus sombre et agressif Bent, et le planant Burnt, somptueux final, climax émotionnel.
Kiasmos n'a pas inventé un genre, cette ambivalence entre ambiant et rythme existait déjà, et a connu son âge d'or au début des années 90 (The Orb, Aphex Twin, Autechre et autres sommités de l'ambiant house et de l'IDM), mais il lui apporte sa propre sensibilité, sa mélancolie, pour un résultat très réussi.
Track List :
1.
Lit
2.
Held
3.
Looped
4.
Swayed
5.
Thrown
6.
Dragged
7.
Bent
8.
Burnt Musiciens : Ólafur Arnalds Janus Rasmussen